Les mémoires transgénérationnelles dans le Devenir Mère
L’Histoire Familiale, génération après génération, est tel un creuset dans lequel nous venons nous imprégner inconsciemment de croyances, de codes, de valeurs explicites ou implicites et bon nombre de vécus émotionnels restés comme en attente, en suspend viennent tirer les ficelles de nos histoires personnelles. J’aime souvent dire que les icebergs que nous sommes ont non seulement 90% de leur volume immergé, mais qu’ils naviguent aussi dans des courants nés des profondeurs transgénérationnelles : courants plus ou moins chauds ou froids, doux ou violents, mais tous guidés par la force des histoires de vie de nos ancêtres.
Ainsi, les étapes du Devenir Mère – et du Devenir Père tout autant !- sont l’une des principales périodes de vie durant lesquelles ces mémoires inconscientes, invisibles mais si puissantes, viennent se réactiver … pour le meilleur et pour le pire. Les courants profonds se font souvent tempétueux, les émotions et le corps des femmes s’en trouvent chamboulés de manière imprévisible. Bien des Voyages en Mère en deviennent alors houleux, malmenés par des vagues inconscientes venues du passé.
Il n’est plus à prouver que notre corps assure brillamment une mission difficile : celle de mettre en maux nos émotions inconscientes. Il s’acquitte merveilleusement de sa tâche, avec une précision de dentelière, en tout temps et à tout âge. Et s’il existe une époque de vie des femmes durant laquelle le corps tient le rôle principal, il s’agit bien du Devenir Mère ! Corps spontanément fertile ou réticent à une conception, corps en transformation pendant la grossesse, en ouverture plus ou moins facile à la naissance, corps en récupération lors du post-partum, corps nourricier de l’allaitement, corps en bouleversements hormonaux ou corps en deuil de grossesses interrompues … bref, le corps des femmes devenant mères est d’une fidélité absolument implacable à sa mission : exprimer en symptômes ce qui n’a pas été consciemment mis en lumière, et ce en lien direct et invisible avec les histoires des femmes devenues mères précédemment dans les lignées. Car ce sont bien des émotions non-résolues de nos ancêtres dont nous héritons, les portant avec une fidélité sans faille sans le savoir.
Les deuils bloqués dans les lignées.
A la faveur d’un désir d’enfant se réactiveront les deuils bloqués d’un enfant mort-né ou décédé en bas âge, interdisant possiblement au présent l’éventualité même d’une conception. Ou une grossesse épanouie tournera brusquement à l’inquiétude à cause d’une pathologie gravidique, rappelant le décès brutal d’une aïeule alors enceinte au même terme de grossesse. Telle mère d’un enfant de 10 ans s’ouvrira en séance des crises d’angoisse qui continuent de la tenir éveillée depuis la naissance de son fils, à l’idée qu’il ne meure dans son sommeil ; 10 longues années d’angoisses que seul l’Arbre viendra éclairer avec le décès accidentel d’un enfant de 11 ans, 4 générations en arrière. L’observation factuelle de concordance entre la date de conception de son fils et la date de naissance de cet ancêtre mort bien trop jeune ne peut pas laisser dans l’indifférence, et aura permis à cette maman de faire sens sur sa problématique, apaisant instantanément ses angoisses.
Lorsqu’une femme des lignées meurt en couches, laissant un mari et possiblement des enfants dans un deuil impossible à faire, comment ignorer la terreur inconsciente qui vient tacitement être réactivée dans une infertilité médicalement inexplicable pour l’une de ses descendantes ? Ou comment ne pas faire le lien avec les symptômes, les cauchemars, les angoisses de mort qui se réveillent brusquement pour elle en fin de grossesse à l’approche de la naissance ?
Ainsi, chaque famille possède son lot de décès inacceptables : autant de chocs émotionnels qui toujours sont enregistrés dans la mémoire familiale, et traversent le temps pour se réactiver lors d’une conception, d’une grossesse, ou toute autre étape-clé des parcours de maternité. L’analyse de l’Arbre viendra confirmer les dates, les rangs de naissance ou de conception, les prénoms, les circonstances de vie, et viendra pointer du doigt les fidélités tacites, les schémas reproduits et les croyances transmises. Chaque histoire est certes unique, mais l’émotionnel d’un deuil bloqué hurle toujours le même inacceptable.
Et que dire du statut de Gisante (voir ouvrages du Dr Salomon Sellam) lorsqu’une femme souhaite concevoir ! En effet, dans le contexte périnatal, être la gisante d’un.e ancêtre conduit fréquemment à des impossibilités de conception. Car la fidélité inconsciente portée à faire vivre à travers soi l’ancêtre parti.e de manière inacceptable, amène comme à une inversion de vie : il arrive ce que je ne veux pas, et il n’arrive pas ce que je veux. Ainsi, vouloir être enceinte et ne pas réussir à concevoir alors qu’aucun empêchement biologique n’est révélé. Car porter le deuil de cet.te ancêtre disparu.e est, somme toute, incompatible à la Vie, à porter la Vie en soi. Se repositionner consciemment dans l’élan de la Vie est alors primordial.
Les mémoires d’avortement.
La honte et le secret qui entourent très fréquemment les avortements choisis et pratiqués à une époque où ils étaient légalement interdits, laissent un bagage non négligeable aux descendantes. L’une portera le poids de cette culpabilité dans une répétition d’interruption volontaire de grossesse, alors que l’époque est définitivement différente d’un point de vue de la légalisation de ce choix, tandis qu’une autre vivra douloureusement une répétition de fausses-couches … chaque histoire nécessite d’être entendue dans l’écho émotionnel qu’elle porte. Les exemples sont si nombreux, et à chaque fois si uniques qu’il est impossible de tenter en dresser une catégorisation.
Bien souvent en séance, le récit factuel de l’Histoire Familiale prend corps en un récit émotionnellement vivant, qui touche au coeur et fait écho aux émotions présentes. Il vient les éclairer, les rencontrer et les soulager. La conscience est portée sur les répétitions, comme dans un vaste théâtre qui serait celui du Devenir Mère : alors que l’actrice principale évolue dans sa propre scène, les éclairagistes mettent progressivement en lumière les acteurs secondaires, l’arrière-scène, les coulisses, le public qui sont autant de membres des lignées venus eux aussi rejouer leurs histoires, leurs drames, leurs vécus. Et l’on s’aperçoit alors qu’en dépit du changement d’époque, de décor, de costumes, ce sont néanmoins les mêmes textes qui sont lus.
Les mémoires d’abus.
Les mémoires inconscientes d’abus perpétrés dans les lignées viennent quant à elles, essentiellement se réveiller au moment des naissances, laissant le corps en proie à des difficultés voire des impossibilités à s’ouvrir au passage de la Vie. Le bassin des femmes est aussi le sanctuaire des violences subies par les femmes de l’Arbre. Il est parfois bien difficile d’apaiser le vécu émotionnel d’une naissance médicalisée, d’une césarienne en urgence, ou la culpabilité de s’être entendue dire que le col de l’utérus refuse de se dilater malgré les contractions, ou qu’un périnée ‘ultra-tonique’ ne laisse pas de passage à bébé, si nous n’avons pas la curiosité de questionner l’histoire des 3 ou 4 générations passées. Au-delà du possible vécu personnel qui nécessite alors d’être accompagné en psychothérapie, on retrouve fréquemment un viol, un inceste, des abus ou attouchements sexuels qui ont engrammé une mémoire bien particulière que le corps se charge de verbaliser en maux chez les descendantes.
Ces mémoires peuvent également se concrétiser dans toutes les douleurs menstruelles, pré-menstruelles des descendantes, dont on dit trop facilement que ‘toutes les filles de la famille ont toujours eu très mal au ventre pendant leurs règles’. Tout avis médical pris par ailleurs, il est intéressant d’aller questionner l’Arbre.
L’aide de l’hypnose spirituelle.
Les bases de connaissance et de compréhension de la Psychogénéalogie sont nécessaires pour ne pas se lancer dans des liens de cause à effet erronés. Il convient donc de savoir construire un génosociogramme, de savoir le lire sans interprétation abusive, de savoir l’utiliser au bénéfice de l’écoute de la cliente présente en séance.
Ensuite, le travail porte toujours la même intention : inviter la personne à reprendre son individualité de parcours de vie, sa souveraineté de choix et de décision consciente. Et pour ce faire, le vécu émotionnel en cause dans sa problématique doit être rendu à l’ancêtre ou aux ancêtres concernés. L’hypnose en état amplifié de conscience, ou l’hypnose spirituelle, présente l’extraordinaire puissance de la rencontre dans un espace vibratoire lumineux, comme hors du temps. Ce sont des séances qui offrent des libérations dans tous les plans, visibles et invisibles : chacun peut ainsi poursuivre son chemin d’Evolution après avoir reçu un message, une compréhension, une consolation, une autorisation, un baume d’apaisement important ou nécessaire pour la suite. C’est aussi dans cet espace que le sujet peut reprendre, avec douceur et bienveillance, mais aussi avec fermeté, son individualité de vie et de choix.
Laisser un temps d’échange en conscience dans ces rencontres avec la présence (réelle, symbolique, représentative, qu’importe) de l’ancêtre à laquelle/auquel on portait fidélité, ou que l’on remplaçait, est d’une richesse infinie : ce sont des moments suspendus où les mots sont impuissants à traduire l’intensité émotionnelle qui s’y joue. Car ce qui habite ces instants, c’est l’Amour incroyable que l’on porte en soi pour ses ancêtres, sans même les connaître, sans même le savoir. Un désir si puissant de les soulager, jusqu’à s’oublier soi parfois.
Alors surgit l’évidence d’un choix possible, d’un avenir différent possible, ou d’un autre positionnement de vie possible. Surgit la clarté de ce qui a été et n’a plus besoin d’être répété ou porté, de ce que le corps a manifesté et n’aura plus à raconter.